Oleg Romantsev : "La sélection russe manque d'un leader"
Sophie 2018-06-08 16:09:03 评论
L'ex-coach à succès russe, Oleg Romantsev, a accordé un entretien à Goal dans lequel il procède à un état des lieux du football dans son pays.
La Coupe du Monde 2018 démarre dans moins d'une semaine. Le compte à rebours final est désormais lancé. Pour prendre son mal en patience et aussi faire honneur au pays hôte, Goal vous propose une série d'interviews exclusives avec d'anciennes légendes du football russe. Après ceux d'Oleg Salenko et de Roman Pavlyuchenko, retrouvez aujourd'hui un entretien avec Oleg Romantsev, un des plus grands entraineurs russes de l'histoire.
Romantsev n'entraine plus depuis 2005. Malgré cela, il reste le technicien avec le plus de trophées remportés en Russie (13) et si on inclut l'ère soviétique, seul Valeri Lobanovski le devance dans ce classement. C'est au Spartak Moscou que cet ex-défenseur s'est fait un nom, jusqu'à en devenir progressivement une véritable icône du club. Avec lui, l'équipe de la capitale a survolé le football national pendant quasiment une décennie. Et elle n'a pas été loin d'être couronnée en Europe. Romantsev a aussi coaché à deux reprises sa sélection nationale. Bien qu'éloigné des terrains et de la compétition aujourd'hui, il est bien placé pour juger l'évolution du football dans son pays à travers les années. Et c'est ce qu'il a fait, entre autres, dans le riche entretien qu'il nous a accordé.
"Le Spartak des années 90 aurait dû gagner une Coupe d'Europe"
Oleg Romantsev : Je suis devenu retraité. J'étais fatigué du football, de la vie, et c'est pour ça que je me suis retiré. Après s'être retiré du banc, j'ai un peu conseillé ceux avec qui j'ai travaillé auparavant lorsqu'ils en avaient besoin. Mais là, en principe, je suis définitivement en retraite.
Toute ma vie a été dédiée au football, alors bien sûr que ça me manque. Mais j'ai conscience que mon temps est fini depuis longtemps et que je n'ai ni la force, ni l'envie de travailler dans le football. Aujourd'hui, je regarde le football uniquement en tant que fan et j'y prends du plaisir.
Pour évaluer la qualité d'un entraineur, il est nécessaire d'assister à ses entrainements. Vous avez besoin de savoir quels paramètres il utilise, et quelle sorte d'analyse il donne à ses joueurs. Et ça, je ne peux pas le savoir. En principe, il me semble que les entraineurs doivent apporter quelque chose d'innovant dans cette vie. Or, ce que je constate, c'est que l'innovation n'est pas vraiment très courante dans le football. Je parle de celui de la Russie particulièrement.
Bien sûr que c'est regrettable, très regrettable. Il y a des raisons objectives et aussi des raisons subjectives au fait qu'on n'a pas gagné, mais c'est sûr que c'est très dommage. Nous aurions dû gagner oui, mais le sort en a décidé autrement finalement. C'est très dommage.
Oui, à maintes reprises même, mais j'ai toujours décliné. Bien qu'il y a parfois eu des propositions très intéressantes. Vous, vous êtes Français, n'est-ce pas ? Et vous aimez certainement votre pays ? Et bien moi, je suis un gars de Ryazan. Je suis né là-bas et j'ai grandi en Sibérie. J'aime beaucoup la Russie. Et c'est pourquoi je n'ai pas trop fais attention à toutes ces propositions. J'ai essayé plusieurs fois, mais à chaque fois que j'ai quitté la Russie, j'ai souffert d'une maladie qui s'appelle la nostalgie. C'est le mal dont je souffre et c'est pourquoi je ne suis allé nulle part. Et sans le moindre regret.
Ce que je pense c'est qu'on doit leur donner une chance. Et pas seulement six mois pour travailler, mais on doit leur faire confiance sur une longue durée. S'ils ont un projet et que ce sont des gars intelligents, ils doivent avoir l'occasion de prouver leur valeur et il ne faut pas les congédier au bout de deux ou trois matches perdus. Je pense que cela dépend beaucoup aujourd'hui des propriétaires du club et de l'idée qu'ils se font du football. Ils ne croient pas vraiment en nos entraineurs, alors qu'à mon avis nos entraineurs à nous sont des gens très talentueux.
Pratiquement tous. Tikhonov, Alenitchev, Parfionov, presque tous essayent d'appliquer un football que vous avez aimé autrefois, que j'ai aimé. Un beau football, et qui permet aussi de gagner. Il y en a aussi d'autres dont je n'ai pas cité les noms, mais qui également tentent d'implanter leurs idées. Ils n'ont pas vraiment les meilleures conditions pour travailler, mais ils font avec les moyens du bord. Eux ne bénéficient pas du même contexte que moi à l'époque : moi j'ai choisi les joueurs, eux on leur impose le recrutement. Vous saisissez la différence ? Moi, je sélectionnais, eux ils composent. Sélectionner, c'est observer et le faire pendant des années. Je voyageais, je regardais et à la fin je choisissais. Pour eux, c'est plus compliqué, et c'est pour ça que leur tâche est malheureusement plus difficile.
C'est plutôt moi qui devrais vous poser cette question. Vous, vous connaissez le football étranger, et moi je connais le football russe. Je suis les football français, allemand et anglais, mais je ne les connais pas vraiment. Donc, je ne peux pas répondre à cette question. Vous êtes probablement plus à même de le faire que moi.
Ils sont tous techniques. Il n'y a que du beau monde dans votre liste (rires). Mais, tout dépend de ce que vous sous-entendez par "technique". Si c'est pour dribbler deux ou trois joueurs dans un espace réduit alors, bien sûr, c'est Mostovoi. Si c'est pour prendre le ballon, le bonifier et offrir la passe juste, alors je citerai Alenitchev et Titov. Mais Cherenkov pouvait faire les deux. Mais, je pense d'après la définition que vous faites-vous du terme technique que c'est bien Mostovoi.
"Avec un Platini ou un Zidane dans notre équipe, tout serait plus facile"
Je pense qu'elle a des problèmes. En fait, ce ne sont même pas des problèmes, c'est juste qu'elle souffre de l'absence d'un leader. Vous savez, des leaders comme vous en avez eu du genre Zidane, Platini. Des patrons autour desquels des équipes ont été construites…
C'est peut-être un capitaine de l'équipe, mais je pense que vous seriez d'accord avec moi pour dire que ce n'est pas un Zidane. Il en est même très loin. Ce n'est pas un leader technique pour qui toute l'équipe joue, et que le coach met en premier sur son tableau. En fait, en y réfléchissant bien, il n'y a vraiment qu'un seul joueur dans l'histoire du football autour de qui a été construit tout le reste de l'équipe. C'est Diego Maradona. Un footballeur qui quand il apparait, le reste de l'équipe se met en place naturellement. Et des joueurs comme celui-là, on n'en a pas. Si nous avions un tel patron, et de préférence deux au centre du terrain, tout serait plus facile. Nous n'avons qu'un seul souhait c'est que le leader ça soit l'équipe. C'est l'espoir que je nourris.
Bien sûr, c'est une très bonne chose, vous rigolez ? Gagner en tant qu'équipe, et pas par la grâce d'un seul joueur. De toute façon, des Maradona, on n'en a jamais eus (rires).
On est tombé dans un groupe qui semble complexe. Je ne dirais pas fort, mais complexe. De nos jours, le football a progressé dans tous les pays, dans tous les continents. En Afrique, en Asie, en Amérique centrale, en Amérique du Sud, il y a du bon football et il y en a toujours eu. Je pense que cela dépendra beaucoup de notre premier match, mais pas totalement. Voilà pourquoi ce groupe est complexe, parce que les chances des trois sélections sont équitables. Nous partons sur un pied d'égalité. Il sera nécessaire de prendre des points et je pense que lors de la troisième journée celui qui faute fera ses bagages, comme lors des matches de Coupe. Nous n'avons aucun avantage, car l'Arabie Saoudite, l'Egypte et l'Uruguay raisonnent de la même façon que nous. En fait, c'est le seul groupe où il n'y a pas un favori évident.
Comme entraineur non. Je n'ai rien décelé de tel. Pour moi, il était un joueur et un capitaine de l'équipe. Ce qui m'a toujours marqué, c'est qu'il est toujours resté après les entrainements. Il mémorisait toujours nos différentes séances, il faisait constamment des retours, des petites synthèses. Il était comme ces gardiens de but perfectionnistes qui savaient de quel côté chaque joueur, de n'importe quelle équipe adverse, aimait tirer ses penalties. Il avait un calepin, sur lequel il notait absolument tout. Ce joueur-là tire les pénalties de ce côté, celui-là de l'autre. Et ce qu'il notait se produisait vraiment. C'est un très bon gars, je lui souhaite du succès.
"Si la Russie n'a rien gagné dans les années 90 c'est entièrement de ma faute"
Je ne veux pas vraiment entrer dans ce genre de débats. Notre équipe était très forte, oui, mais le fait que nous ne pouvions pas gagner est notre grand tort. Et c'est avant tout mon erreur. Je m'en repens toujours. Notre équipe nationale pouvait très bien être championne d'Europe, mais quelque chose n'a pas fonctionné. Et je l'assume parfaitement : c'était mon erreur, et je n'ai pas fini mon travail. Mais le fait que cette sélection-là était plus forte sur le papier c'est incontestable.
Et bien, je ne sais pas. Peut-être qu'il nous faut du temps. Car si aujourd'hui, on refait une équipe de l'URSS avec des sélections comme la Russie, la Biélorussie, le Kazakhstan, l'Arménie, l'Ukraine, l'Azerbaïdjan pour en tirer les meilleurs joueurs alors elle sera très probablement compétitive dans tous les tournois. Le football russe a encore besoin de temps.
Ah, j'ai beaucoup d'estime pour le football français ! Il y a beaucoup de grands joueurs français que j'adorais et dont je suivais la progression. Vous savez, et ça va vous faire rire peut-être, mais l'Equipe de France c'est un peu comme l'équipe russe, elle peut gagner et perdre contre n'importe qui. S'ils ont la réussite avec eux, et qu'ils sont unis, alors ils peuvent faire quelque chose.
La victoire contre la France au Stade de France (3-2) quand j'étais sélectionneur en 1999. Et comme entraineur en club, ce serait peut-être le succès avec le Spartak à Santiago Bernabeu face au Real Madrid (3-1) en 1991. Et le pire souvenir, c'est quand Filimonov envoie le ballon dans nos propre filets à la dernière minute du match contre l'Ukraine qui comptait pour la dernière journée des éliminatoires de l'Euro. Alors que nous avions battu les champions du monde quelques semaines auparavant, et qu'on était en passe de terminer premiers de notre groupe, on termine finalement troisièmes à cause de cette grosse bévue et on rate la qualification. Un bien triste souvenir.
- 消息参考来源: FR_GOAL
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